Proposition de sujet

Genius,¹ créé en 2009, est un site web dont la première mission a été la transcription et l’annotation de paroles de rap afin de créer une base de données sur le hip-hop fonctionnant selon le modèle du crowdsourcing.

Aujourd’hui, Genius est une compagnie médiatique massive et sa mission a depuis longtemps dépassé la sphère hip-hop en proposant des textes d’horizons divers à plus de deux millions de membres qui participent à l’édition et au développement de sa base de données.²

Donc, au-delà de l’analyse de chansons, ce que Genius propose est une manière différente d’envisager le travail du lecteur dans le web : l’annotation. (Kessler 2012)

Cet outil, au coeur de la plateforme, témoigne de la volonté de Genius d’ « annoter le monde » pour se présenter comme le « Talmud de l’internet » (Wiedeman 2014) à la source d’un changement de paradigme dans notre conception du web.

Dans cette perspective, ce travail se penchera sur l’annotation afin de repenser l’autonomie du texte à partir de la notion de présence (Cavallari 2016). Mon hypothèse est que l’annotation à même le texte permet au lecteur d’ajouter sa présence, de raviver une connaissance en apparence cristallisée et ainsi de ranimer les grammatas (Platon s. d.) par l’hyperlien qui réintroduit paradoxalement de l’humanité dans l’écriture. Que de nombreux auteurs annotent également leurs propres textes en collaboration avec les lecteurs montre que le fait numérique remet en question le couple lecteur-écrivain tel qu’il s’est développé au cours des derniers siècles.

L’histoire de la plateforme, en particulier le litige entourant la question des droits d’auteur (Sisario 2013), permettra de poser une réflexion sur la conception de l’écriture comme seconde à la parole. En effet, pourquoi les textes de chansons circulent-ils librement (et illégalement) pendant si longtemps alors que l’industrie de la musique a très rapidement défendu les droits d’auteur des chansons sous leur forme musicale?