Poétique de l’inhumain (genèse, brouillon, carnets)
Département des littératures de langue française
2104-3272
Sens public

TITRE PROVISOIRE : POÉTIQUE DE L’INHUMAIN : REPRÉSENTATION ET EXCÈS

Résumé

Ce mémoire propose de poser quelques-unes des bases possibles (prolégomènes) pour une poétique de l’inhumain à partir de l’oeuvre d’Isidore Ducasse (Les Chants de Maldoror et Poésies I et II), aussi dit Comte de Lautréamont. Établir des bases implique une méthode, elle-même problématisée à travers ce processus de dés-anthropomorphisation que je chercherai à circonscrire dans ce mémoire. Le concept de désanthropomorphisation, nerf ou tension du pli de l’épistémologie sur le poétique (le pli de l’imaginaire sur le Réel) implique : 1) une méthode de lecture autre (actualisation et théorie-fiction) qui pense l’inhumain en tant qu’inhumain ; 2) une accélération de la dé-limitation entre ce qui est humain et ce qui ne l’est pas (la limite et son excès ou excédant) ; 3) critique de la représentation - aussi conceptualisé dans Différence et répétition comme image de la pensée par G. Deleuze - et son rapport anthropo-transcendental et légal (le problème de ce qui est fondé en droit) ; 4) une théologie de l’horreur en tant qu’un processus de désantropomorphisation (l’Un en tant que processus de tensions insolubles) implique un excédant mystique/à-venir/inhumainement transcendantal (le Dehors, le Dieu à venir de Q. Meillassoux, la Deconnection Theory de Roden, Terreur et sublime d’Ollivier Dyens)

Plan provisoire

EN COURS D’ÉCRITURE

  1. THÉORIE-FICTION ET ACTUALISATION / 1.1) Méthode actualisante (Yves Citton) ou principes de théorie-fiction (intégrer Poésies 1 et 2) ; 1.2) Que peut le texte littéraire dans un contexte de rupture épistémologique? Crise de la lisibilité et de l’autorité ‘’légale’’ (de droit) ; 1.3) Qu’est-ce qu’écrire désanthropomorphisé? écrire la limite et son dehors (territorialisation, déterritorialisation) ; 1.4) Théorie de lecture comme théorie-fiction, manières de prolonger Lautréamont dans une lecture critique (son rire, son ironie, son excès nihiliste, l’inhumain comme processus). 1.5) Abolir le duo sujet/objet ; hyperstition ; Évoquer Blanchot, Bachelard, Pierssens, Eugène Thacker pour faire le pont vers la critique image de la pensée (IMP). CRISE DE LA REPRÉSENTATION ENGENDRÉE PAR LA CYBERNÉTIQUE (ET, PLUS ANCIENNEMENT, LES MÉDIAS) (QUI LIT, LIE, LA CRITIQUE IMAGE DE LA PENSÉE, AXIOME DE L’INHUMAIN) : ‘’The obscene is defined by opposition to’‘the scene’’ which, Baudrillard says, belongs to a certain theatrics propre to what he thinks of as a supersed psychoanalytic paradigm: here, mimesis, representation, projection and mirroring all still made sense.’’ Fisher FC:GMCTF

2.1) Élaboration et explicitation des notions d’‘’inhumain’’ et de ‘’désanthropomorphisation’’ par-devers le posthumanisme (référer Roden, entre autres ; dialoguer avec Meillassoux et la critique du corrélationnisme - y attacher, peut-être, le texte , D’un ton apocalyptique adopté naguère en philosophie de J. Derrida : rapport en finitude, humain (anthropos) et critique comme méthode). Crise de la lisibilité : théorie de lecture qui épuise le canon herméneutico-philologique pour aboutir à un contexte cybernétique et actualisant (trouver de meilleurs mots).

  1. CRITIQUE IMAGE DE LA PENSÉE / 2.1) Sujet/loi/représentation - transcendance ; (haine de la poésie (représentation et transgression) Bataille) ; 2.2) Posthumanisme : rapport limite entre sujet/objet (où est-ce que se situe la limite et qui la désigne - accélération de celle-ci, circonscrire cette accélération (plastique ou dialectique - quelle dialectique?).

  2. LIMITE ET EXCÈS / (Chapitre pas encore pensé, mais évidemment en résonnance avec les trois autres). 3.1) Penser avec le réel et non en se le représentant : «Parallèlement, c’est leur forme représentationnelle qui rend les arguments des philosophes circulaires. Le raisonnement philosophique est tautologique, privilégiant une preuve empirique en particulier et l’érigeant au statut de transcendance ou de représentation » (La philosophie non-standard de François Laruelle, p. 15). 3.2) Vitesse et accélération et son rapport avec le sublime que l’on peut rapporter à l’excès nihiliste de Lautréamont (ironie, parodie, pastiche) : condensation de sens dans la surchage des procédés stylistiques employés ; rapport avec la limite, le dehors. 3.3) Lien entre posthumanisme et gothique ; entre posthumanisme et littérature fin de siècle, littérature de la décadence. Tentative d’éclater l’image de la pensée, un lien humain avec la représentation.

  3. CONTINGENCE ET THÉOLOGIQUE DE L’HORREUR (chapitre le moins bien défini et fort probablement facultatif, parce que mémoire de moins de 130 pages) ; Horreur et nihilisme (rupture épistémologique, du principe de raison suffisante). La perte de transcendance engendre une mystique de l’horreur, de l’attente, d’une altérité. Le Dieu à venir de Meillassoux.


Notes éparses

  • (Autre considérations, en arrière-plan. Le problème qui, en filigrane, structure ce mémoire peut probablement se résumer à celui de la représentation et de la limite. La question de la critique présuppose une limite qu’elle repousse pour en instituer une autre ; la critique présuppose en quelque sorte un idéalisme ou métaphysique de la critique qui, constamment, repousse ce qu’elle fonde - le rapport statique et catégorique du sujet/objet de Kant qu’Hegel propose de résoudre par un mouvement dialectique du sujet dans l’objet et de l’objet dans le sujet. Le post-structuralisme s’est intéressé à la négativité en elle-même (lecture singulière de Hegel par Kojève, qui en a façonné la réception dans le paysage intellectuel français de l’époque), en tant qu’en dehors du mouvement dialectique ; il y a une tentative de penser la dialectique autrement par, entre autres, Deleuze(&Guattari) ou Lyotard, en tant que création d’une troisième entité, elle, autonome, du mouvement qui l’a engendrée (le rhizome, le désir comme politique, etc.) - (rajout, 2021-08-27 : plutôt qu’une troisième entité, entendre un régime de pôles), de vertical à horizontal. Lyotard se résout, dans ses dernières positions, à l’impossibilité d’un ‘’immanentisme’’ pourrait une catégorisation kantienne phénomène/noumène. Étonnamment, il cherche à penser le sublime comme excès nécessaire. Bref, le vieux débat entre matérialisme et idéalisme, transcendance et immanence. Refuser cet héritage est donc en quelque sorte problématique, notamment parce que le posthumanisme et le transhumanisme s’y inscrivent — on en revient toujours aux prises de position post-structuralistes comme horizon de la critique posthumaine/transhumaine, bien qu’on tende à y sortir progressivement de par la nécessité de repenser l’épistémologie comme ce qui fonde en droit et en fait notre rapport au Réel avec des réflexions transdisciplinaires (sciences, littérature, écomomie, etc.) ; (rajout, 2021-08-27 : le Réel comme Absolu chez Meillassoux pour aller vite, mais qu’en le Réel s’effondre dans la fiction - cybernétique, que reste-t-il? Hégémonie du discours cybernétique dans l’écologie du langage : les êtres langagiers se retrouvent soumis au code). La tendance simultanée de l’intensification du travail critique (féminismes, décolonialismes, les post-, etc.) et des problèmes associés à l’accélération d’une altérité épistémologiquement alienne (le Réel en tant que dehors écologique, politique, économique, technologique, etc) fracturent cette épistémologie du Même politico-scientiste (terme avec lequel je ne suis pas satisfait, mais qui dénote le rapport théologico-politique et scientiste que nous avons hérité du christianisme et de sa sécularisation progressive). La dé-limitation ou délégitimisation des instances discursives permet le pli du poétique sur l’épistémologie : plasticité, repenser notre rapport au réel, etc.). La littérature s’inscrit dans une horizontalité transdisciplinaire en ce qu’elle permet une intensification du démantèlement du Même (entre autres principe de raison suffisante), elle-même perpétuellement déplacée par le Réel. La question du texte, du discours (fiction, théorie) prend dès lors de l’ampleur, de même que la question de la lecture. Crise d’autorité et de lisibilité. Tout n’est certainement pas texte (d’autres sciences demandent d’autres méthodologies), mais le problème de ce qui est représenté et ce qui est délimité en est un qui recoupe actuellement la crise de la réalité et du savoir, que le texte et la lecture peuvent aborder de front - l’imaginaire, le symbole, la langue, la rhétorique s’y recoupent quoique bien évidemment distincts.)

  • Là où la désanthropomorphisation du suje gagne une importance biologico-politico-sociale, son caractère reterritorialisant polit sa radicalité en discours esthético-éthique. Désintensification du processus qui ne tire pas les conclusions les plus radicales.

  • Maldoror est processus et non entité, pure immanence d’un dehors pointé vers l’inhumain.

  • Texte qui fuit, non pas parce que incompréhensible, mais parce que limite (le dehors) le pathétique, le double, la violence, l’excès, la dépense, etc. .

  • Principe de non-contradiction, la poétique, la raison qui se fonde, démantelée par Lautréamont ; l’horreur de la chose en soi, de l’altérité, répresentée au-delà de l’humain.

  • Maldoror philosophe / chants de Maldoror comme texte philosophique (concepts) / accélération du devenir-animal

  • Événement/représentation ; chaos/excès, irreprésentabilité ou dé-représentation, le Réel comme irreprésentabilité pure

  • Tension entre Chants de Maldoror et Poésies comme Un → Deux (signification d’une différence en tant qu’impossibilité d’une relation fixée entre deux éléments ; relation dynamique en perpétuel mouvement entre deux éléments)

  • Problèmes de représentation : 1) comme jugulation d’un potentiel conceptuel d’un devenir autre ; 2) surtout comme inadéquation avec ce que le réel est en train de nous imposer, c’est-à-dire incapacité à penser la littérature, la pensée hors d’un cadre corrélationniste et phénoménologique, de penser le texte hors de sa manifestation textuelle. Le texte permet de médier le réel, par-devers lui, il n’est certainement pas autotélique : il est dialogue avec le réel (contre le parnasse increvable).

  • Désanthropomorphisation : n’est certainement pas une tentative de trouver une rédemption ni une quelconque solution ; nous restons humains malgré tout. C’est un processus qui tend à une décentralisation progressive de la perspective humaine, amorcée depuis Kant/Copernic. Lautréamont est impitoyable et froid : il ridiculise la bassesse intellectuelle de son époque et la facilité d’un espoir à trouver en quelconque courant comme le scientisme (Poésies 1 et Poésies 2) ou l’exaltation romantique (Chants de Maldoror). En allant au bout de leur logique respective, ces perspectives ou épistémologie en droit sont rompus par l’excès : excès par absurdité, excès de sens, excès par la violence stylistique.

  • figure rhétorique du chiasme : 1-1, pli, mise en abîme, miroir, les chants/poésies : chiasme dont la limite, la membrane, le passage pose les questions de la limite, la dépense, l’ironie, inorganique à organique vers l’inorganique.

AB-HUMAIN : https://socialecologies.wordpress.com/2022/03/24/why-not-abhumanism-rather-than-posthumanism/ ; https://en.wikipedia.org/wiki/Abhuman; https://www.quora.com/Is-ab-in-abnormal-a-prefix-If-so-in-which-other-words-is-it-a-prefix