Variété et interaction des phénomènes empathiques dans la lecture scolaire des œuvres littéraires
Véronique Larrivé

Préambule

Dans le premier chapitre de son ouvrage Lire dans la gueule du loup, Hélène Merlin-Kajman fait état de la difficulté à s’arracher à l’illusion référentielle pour aborder la lecture littéraire comme un art de la distanciation et de l’analyse. Aussi, pour mieux interroger les enjeux de la lecture littéraire, pose-t-elle d’emblée la question de l’apprentissage lectoral, tel qu’il a été longtemps conçu, en termes d’arrachement à l’expérience immersive, voire de répudiation totale de ce qui a été ressenti (2016 : 23). De son côté, analysant le fondement anthropologique des dispositifs fictionnels dans Pourquoi la fiction ?, Jean-Marie Schaeffer considère qu’une fiction ne « fonctionne » comme telle que si elle a été « intériorisée à travers un processus d’immersion mimétique » (1999, 198). Citant l’exemple de l’étude scolaire du roman L’Étranger, il rappelle que l’école attend des élèves une posture analytique leur permettant d’identifier « la façon dont Camus structure son univers fictionnel », mais que cette attitude, aussi utile qu’elle soit pour la connaissance littéraire, nécessite que l’univers fictionnel ait été « assimilé », ce qui implique que le récit soit lu « sur le mode de l’immersion fictionnelle » et « du plaisir pris » à la lecture de l’histoire racontée. Il rappelle que le risque existe, sinon, de « devoir enseigner la fiction littéraire comme une langue morte » (ibid.). Ces deux affirmations données comme préambule, nous aimerions, dans le cadre du questionnement sur la lecture littéraire à l’école et au prisme de nos travaux de recherche portant sur l’empathie fictionnelle dans l’enseignement de la littérature, interroger la tension entre l’indispensable implication dans la fiction et la distanciation nécessaire à l’analyse.

Notre propos concernera les relations empathiques dans l’activité lectorale à l’école, appuyé sur un modèle déjà présenté (Larrivé 2014, 2017), complété ici par les apports de Nathalie Blanc concernant la typologie des émotions du lecteur, telle qu’exposée dans Émotions et cognitions (2006). À partir du concept de va-et-vient dialectique entre activité de lectant et activité de lisant développé par Jean-Louis Dufays (Dufays, Gemenne, et Ledur 2005, [1996]; 2014), nous proposerons, pour la lecture dans le cadre scolaire, de compléter ce modèle en y introduisant la communauté de lecteur.rice.s qu’est la classe et les émotions empathiques que cette communauté suscite chez l’élève lecteur.rice. Cela nous amènera à repenser le dispositif écrit d’accompagnement de la lecture de fictions narratives qu’est le journal de personnage à l’aune de la dimension éminemment sociale de la lecture subjective des textes en classe, en proposant sa corrélation avec d’autres activités permettant des interactions orales entre lecteur.rice.s. Quelques résultats préliminaires seront exposés, justifiant une recherche collaborative lancée prochainement qui intégrera, dans son cadre théorique, les phénomènes empathiques synthétisés dans le modèle proposé.

L’empathie lectorale

La représentation de l’empathie lectorale que nous proposons s’appuie en premier lieu sur les modèles théoriques croisés de Michel Picard (1986) et Vincent Jouve (1992) qui, par analogie avec l’activité du.de la joueur.euse, considèrent que l’activité du.de la lecteur.ice est assurée par plusieurs instances lectrices fonctionnant en synergie, mais dont le rôle est pondéré en fonction du type de lecture effectuée1. Le.a lectant.e correspond à l’intellect du.de la lecteur.rice, spécialisé dans le game ou le jeu de stratégie (Picard 1986, 162) ; le.a lisant.e représente l’imagination du.de la lecteur.rice et sa capacité de playing, c’est-à-dire sa capacité à faire vivre un univers fictionnel dans lequel il s’immerge mentalement (Jouve 1992, 82). Partant du principe que l’activité lectorale est caractérisée par un état mental scindé (Schaeffer 1999, 190), nous avons modélisé cette activité sous la forme de deux espaces contigus, représentant l’un le monde réel, l’autre le monde fictionnel, dans lesquels sont placées les instances lectrices correspondantes : le.a lisant.e investit mentalement le monde fictionnel, quand le.a lectant.e habite le monde réel. Dans cette représentation, l’univers fictionnel est considéré comme un monde possible, selon la définition de Thomas Pavel (1988), et il possède donc, du point de vue du.de la lecteur.rice, une dimension ontologique indéniable.

À partir de ce cadre, en nous appuyant sur les théories de la fiction développées entre autres par les philosophes américains Kendall Walton (1990) et Gregory Currie (1990), et reprises par Jon-Arild Olsen dans La pensée du roman (2004), nous pouvons représenter les relations empathiques qui s’établissent entre le.a lecteur.rice et les êtres de conscience qui habitent les deux univers représentés. D’une part, le.a lecteur.rice en tant que lisant.e entre en relation intersubjective avec les personnages de la fiction, dont iel essaie de saisir les états mentaux, i. e. ses émotions, pensées et intentions ; il s’agit du phénomène d’empathie fictionnelle que nous avons déjà décrit (Larrivé 2014, 2015, 2017; Larrivé et Louichon 2020). D’autre part, le.a même lecteur.rice en tant que lectant.e, et même lectant.e interprétant.e (Jouve 1992, 84), essaie d’imaginer les intentions de l’auteur.rice inféré.e, c’est-à-dire l’instance organisatrice du récit telle qu’iel l’imagine ; c’est ce que nous avons appelé le phénomène d’empathie textuelle (Larrivé 2014, 2017). Cette vision duelle des phénomènes empathiques dans la fiction est confirmée par le travail de Nathalie Blanc qui, dans les émotions empathiques du.de la lecteur.rice, distingue également celles qui sont suscitées par la fiction2 et celles qui sont suscitées par le texte, considéré en tant qu’objet artefact produit par une instance créatrice3 (2006, 141).

Les rôles du liseur et du lisart

La troisième instance lectrice représentée dans notre schéma est le corps du.de la lecteur.ice, dont les sciences de l’esprit4 ont dit le caractère primordial dans les phénomènes de simulation incarnée qui permettent la relation empathique (Larrivé 2015). Si Picard et Jouve nomment liseur ce corps physique du.de la lecteur.rice, matériellement installé dans le réel et physiquement ému par la lecture, notre modèle propose, en raison de phénomènes empathiques différents, de distinguer deux instances corporelles chez le.a lecteur.rice de récits. C’est ainsi que nous avons nommé lisart le corps simulateur lié aux phénomènes d’empathie provoqués dans l’univers fictionnel par les relations intersubjectives avec les personnages. Le lisart est alors l’instance corporelle émue par les émotions fictionnelles empathiques, comme par les émotions fictionnelles personnelles, sympathie ou antipathie, éprouvées par le.a lecteur.rice à l’égard desdits personnages. C’est donc à dessein que nous représentons le lisart entre le monde réel et le monde fictionnel, pour montrer son don d’ubiquité : campé physiquement dans le réel mais réagissant émotionnellement à l’univers fictionnel, intrinsèquement virtuel. Pour compléter le panel des émotions ressenties par le couple que forment lisant et lisart, notons que certains objets du monde fictionnel peuvent également susciter chez le.a lecteur.rice des émotions fictionnelles personnelles, parce que ledit et ladite lecteur.rice les apprécie, les déteste ou bien les craint.

Nous avons gardé le nom de liseur pour le corps simulateur lié aux phénomènes d’empathie provoqués dans le monde réel. Le liseur est donc ici l’instance corporelle émue tant par les émotions textuelles empathiques éprouvées vis-à-vis de l’auteur.rice inféré.e que par les émotions personnelles textuelles, sympathie ou antipathie, que le.a lecteur.rice ressent à son endroit. Entrent également dans le cadre des émotions personnelles textuelles, celles d’ordre esthétique que le.a lecteur.rice ressent face au récit, en tant qu’objet textuel, dont iel apprécie ou non les aspects structurels (Larrivé 2014).

Nous obtenons ainsi un premier schéma des relations empathiques dans la lecture.

Figure 1 : Modèle de l’activité empathique du.de la lecteur.rice de fiction.

Un modèle des phénomènes empathiques à compléter

Si notre modèle de l’activité empathique dans la lecture est efficace pour réhabiliter un aspect de la lecture longtemps dénigré, relatif à l’immersion fictionnelle et à la participation psycho-affective du.de la lecteur.rice au récit, il laisse cependant en retrait la dimension sociale de la lecture, dimension pourtant primordiale dans la lecture scolaire.

Face au danger, exprimé par Jean-Marie Schaeffer, de démotiver les élèves par des analyses distanciées coupées de la réception subjective des récits de fiction, Jean-Louis Dufays (2014) tente de « (ré)concilier les lectures du premier et du second degré » par un dispositif didactique, celui du dévoilement progressif, qui permet de mettre en œuvre dans la classe le va-et-vient dialectique entre lecture participative et lecture rationalisante, tel qu’il le prône depuis plusieurs années (Dufays, Gemenne, et Ledur 2005, [1996]). Or, la démarche présentée, que nous citons ici à titre d’exemple, fait une large place aux interactions entre pairs, sous la forme de questionnements mutuels et de débats interprétatifs dont Jean-Louis Dufays montre l’efficacité. Le rôle des interactions orales au sein de la classe, sur lequel se sont penchés nombre de didacticiens de la littérature (Hébert 2002, 2015; Tauveron 2002; Daniels et al. 2005; Lafontaine, Terwagne, et Vanhulle 2006), semble donc également mériter d’être pris en compte dans cette représentation des relations empathiques dans la lecture.

Dans la préface de Quand lire c’est faire (2007), traduction française de l’ouvrage de Stanley Fish, Yves Citton souligne en effet que les « communautés interprétatives […] donnent aux subjectivités individuelles leurs formes, leurs limites et leurs visées » (18), rappelant que l’interprétation d’un texte ne saurait s’analyser hors de la communauté de lecteur.rice.s qui la conditionne et la contraint. En conséquence, nous proposons d’ajouter au modèle précédemment établi les êtres de conscience liés au récit que sont, dans le monde réel, les co-lecteur.rice.s dudit récit. Dans la classe, ces co-lecteur.rice.s sont d’abord les élèves, en tant que pairs, dont chacun.e essaie de comprendre les avis développés sur le récit pour nourrir sa propre réflexion, mais également l’enseignant.e, dont le statut de lecteur.rice expert.e joue un rôle déterminant dans les relations empathiques mises en jeu. En effet, les élèves cherchent souvent à saisir l’interprétation que leur professeur.e fait de l’œuvre, afin de se conformer aux attentes d’adéquation interprétative qu’iels croient saisir chez lui.elle5.

Pour caractériser l’activité empathique conjointe du lectant et du liseur, le modèle proposé s’enrichit ainsi de la présence de co-lecteur.rice.s à l’égard desquels le.a lecteur.rice met en jeu des phénomènes empathiques que nous avons regroupés sous le terme d’empathie socio-lectorale6. Ce terme nous paraît en effet bien rendre compte à la fois de la dimension sociale de la lecture, mais aussi de la nature de cette relation empathique entre pairs, tout orientée vers la saisie chez l’autre de sa réception subjective de l’œuvre lue en commun. Ces relations intersubjectives sont fondées sur des émotions que nous avons appelées émotions socio-lectorales empathiques, elles-mêmes complétées par les émotions socio-lectorales personnelles éprouvées par l’élève lecteur.rice à l’égard de ces différents co-lecteur.rice.s, qu’iel peut apprécier ou détester, admirer ou mépriser, etc. La classe n’échappant pas, en tant que communauté discursive, aux tensions liées à la sympathie ou à l’inimitié entre pairs, ces émotions sont susceptibles de jouer un rôle dans les échanges interprétatifs sur le texte. Lors des activités réflexives menées collectivement à l’oral, la régulation de ces tensions par une distribution des rôles dans le groupe et par des règles de prise de parole, est au cœur des dispositifs didactiques comme les débats ou les cercles de lecture.

À partir de ces constats, nous pouvons donc proposer un modèle plus complet de l’activité empathique du.de la lecteur.rice de fiction.

Figure 2 : Nouveau modèle de l’activité empathique du.de la lecteur.rice de fiction.

Le journal de personnage

L’activité empathique dans la lecture ainsi modélisée, il s’agit maintenant de s’interroger sur la manière de concilier la lecture personnelle des élèves, subjective et singulière, avec la lecture collective, raisonnée et partageable. Le travail mené depuis plusieurs années sur le dispositif du journal de personnage nous a permis de montrer l’intérêt des activités d’écriture en « je » fictif pour accompagner la lecture des œuvres de fiction narrative et la participation de ces écrits au développement de la compétence fictionnelle des élèves, au sens que lui donne Jean-Marie Schaeffer, c’est-à-dire la capacité à s’immerger dans la fiction (1999, 180) et à saisir les états mentaux des personnages en entrant en empathie avec eux (Larrivé 2014, 2015, 2017). Cette question est notamment au centre de notre travail de thèse (Larrivé 2014), mené sous la direction de Brigitte Louichon. En proposant, dans l’écriture, de « rejouer le jeu de la fiction » déjà expérimenté dans la lecture (Larrivé 2020), ce dispositif s’est avéré également représenter un projet motivant pour les élèves, en raison des émotions fictionnelles personnelles éprouvées à l’égard des personnages et plus largement à l’égard de l’univers fictionnel qu’il réactive. En paraphrasant Jean-Marie Schaeffer (1999, 198), on peut affirmer qu’en réhabilitant le bovarysme littéraire, le dispositif du journal de personnage permet aux élèves « d’assimiler le monde fictionnel » et aux professeur.e.s d’enseigner la fiction littéraire « comme une langue vivante ». Dans le modèle de l’empathie lectorale établi ci-dessus, c’est donc l’hémisphère gauche, relatif au monde de la fiction, qui est, avec le journal de personnage, l’objet de l’attention didactique.

Lors des diverses mises en œuvre de ce dispositif, l’analyse s’est portée essentiellement sur les écrits produits par les élèves et sur des propos tenus en entretiens individuels concernant l’expérience phénoménologique pendant l’écriture en « je » fictif (Larrivé 2014). Pour autant, dans les classes qui ont expérimenté le journal de personnage, les productions écrites ont également été discutées entre élèves et ont parfois donné lieu à des débats, mais cet aspect du travail mené en classe, dans sa dimension collective ou interactionnelle, n’était pas au cœur de notre travail d’alors.

Depuis quelques années, la question du lien entre participation et distanciation dans les séances de littérature dédiées au journal de personnage est également au centre de nos préoccupations, d’abord pour répondre aux questionnements des futur.e.s professeur.e.s en formation, puis comme objet de recherche à part entière, tant du point de vue théorique que du point de vue didactique. Il nous semble en effet intéressant de voir si les interactions avec les pairs, nécessitant une prise de distance et un retour sur le texte, modifient la représentation subjective que l’élève lecteur.rice se fait de l’univers fictionnel, et notamment si les résultats de l’empathie éprouvée à l’égard du personnage s’en voient bouleversés, avec une transformation des sentiments, pensées et intentions prêtés au personnage. La question est ici de mesurer l’intrication des phénomènes empathiques conjoints, c’est-à-dire les liens entre l’empathie fictionnelle d’une part et les empathies textuelle et socio-lectorale d’autre part. Pour compléter ce travail de recherche concernant les liens entre implication subjective et réflexion collective, nous aimerions observer si les émotions personnelles ressenties pour le personnage, comme les jugements d’ordre axiologique énoncés à son égard, peuvent également être modifiés par les échanges entre co-lecteur.rice.s.

Des dispositifs didactiques à corréler

Nous souhaitons maintenant rendre compte très rapidement de quatre projets de recherche menés en 2020-2021, qui associent journal de personnage et interactions orales entre pairs. Trois de ces projets ont été menés par des professeures des écoles stagiaires, dans le cadre de leur écrit réflexif7, en classe de CE2 pour accompagner la lecture de l’album Aagun (2009) de Thierry Dedieu pour l’une, en classe de CM1, pour accompagner la lecture du roman Rêves amers (2001) de Maryse Condé pour les deux autres8. Le quatrième projet est un travail exploratoire, que nous avons mené en juin 2021 dans les deux classes de 6ème d’une professeure expérimentée, en accompagnement de la lecture de l’album de François Place Les derniers géants (1992)9.

Dans toutes les classes concernées, le travail s’est opéré avec un scénario assez identique, selon le principe d’une lecture par dévoilement progressif dont les étapes ont été dûment choisies en fonction des variations des états mentaux des personnages, mais aussi des émotions et des jugements axiologiques déclenchés par le texte. Voici le résumé du protocole appliqué à chaque étape, trois fois maximum dans le cours de la lecture : 1/ lecture par l’enseignante de l’extrait de texte découvert, 2/ premier écrit en « je » fictif (T1) adoptant le point de vue du personnage diariste, 3/ oral partagé, 4/ relecture du texte par l’enseignante, 5/ second écrit en « je » fictif (T2) reprenant la consigne précédente. L’activité orale est menée, au libre choix de l’enseignante, sous la forme d’un débat, de cercles de lecture ou d’échanges en grand groupe sous sa direction. Lorsque c’est possible techniquement, ces activités orales sont enregistrées. La consigne de travail, également choisie par l’enseignante, propose aux élèves de répondre à une question sur la diégèse, d’imaginer la suite du récit, de se positionner par rapport à l’attitude des personnages, d’interpréter le texte ou bien de réfléchir à une question morale.

La comparaison entre les écrits premiers (T1) et les seconds (T2) permet de mettre en exergue ce que les interactions entre pairs, avec ou sans la médiation de l’enseignante, ont modifié dans la saisie subjective du monde fictionnel par les élèves et dans leur compréhension des états mentaux – sentiments, pensées et intentions – du personnage diariste.

Premiers résultats exploratoires

Dans les expérimentations menées en classe de CM1 en accompagnement du récit de Maryse Condé10, la lecture s’arrête par exemple au moment où Rose-Aimée perd l’argent récolté auprès d’une cliente, lors d’une livraison pour sa patronne. Après un premier écrit en « je » fictif (T1) permettant d’exprimer les émotions ressenties par Rose-Aimée à la perte de cet argent, le débat entre les élèves concerne le dilemme moral qu’expérimente la jeune héroïne, hésitant entre un humble retour chez sa patronne au risque de se faire maltraiter et une possible fuite pour se protéger de la colère de Mme Zéphyr et défendre sa sécurité personnelle. Après ce débat, les élèves sont à nouveau invités à rédiger les réflexions que Rose-Aimée est susceptible d’écrire dans son journal intime (T2). La comparaison des écrits T1 et T2 montre que la discussion sur la situation morale de Rose-Aimée a fait changer d’avis 4 élèves d’une classe et 9 de l’autre, leur permettant d’affirmer, au nom du personnage, une position plus volontaire. En voici trois exemples :

ÉLÈVE 19
T1 : Je vais mentir à madame Zéphyr en lui disant que madame Dorismond payera demain car elle n’a pas assez d’argent. Je suis en colère […] J’ai très peur. D’abord, je vais chercher, si je le trouve, pas besoin de mentir, mais si je ne trouve pas, il faut que je mente.
T2 : J’ai discuté avec mes amies, je vais être honnête puis je vais m’enfuir pour qu’elle ne me tape pas11.

ÉLÈVE 11
T1 : J’ai peur que Mme Zéphyr me batte car cet argent est surement très important pour elle.
T2 : Je pense que je vais aller travailler chez Mme Dorismond..

ÉLÈVE 16
T1 : Tout cet argent, il faut que je le retrouve, sinon je sais ce que Mme Zéphyr va me faire. Eh oui, elle va me gifler encore une fois.
T2 : Allez, je ne vais pas retourner chez cette folle, je vais partir chez mes nouveaux amis12.

Les échanges oraux, à dimension axiologique, sur le sort de Rose-Aimée ont bien modifié, chez ces élèves, la représentation mentale des états mentaux du personnage. Dans les trois exemples, Rose-Aimée quitte une attitude passive de domestique soumise (résignation au mensonge, tentative de justification de l’attitude de Mme Zéphyr, anticipation des coups qu’elle va subir) pour une attitude active et volontaire, dont témoignent ses prises de décision : « je vais partir », « je vais aller travailler chez… ».

Dans le travail sur l’album Aagun en CE2, il apparaît également que l’interaction avec les pairs, menée ici en cercles de lecture de cinq élèves, génère dans l’écriture en « je » fictif un changement partiel de positionnement émotionnel à l’égard du personnage d’Aagun13. Dans les deux écrits successifs, rédigés après la lecture de l’arrivée d’Aagun, de la découverte de son attitude étrange aux yeux de tous et de son départ impromptu, les élèves doivent se mettre à la place d’un des villageois et écrire au seigneur Batoor pour lui parler du comportement de ce personnage énigmatique. Entre ces deux écrits (T1 et T2), les cercles de lecture permettent de discuter des intentions du personnage, traitre ou allié du village, et d’émettre des hypothèses sur la stratégie qu’il met en œuvre à l’égard des Hounks. Or la moitié des élèves adoptent, entre le premier écrit et le second, une attitude différente à l’égard d’Aagun, laissant voir que la discussion modifie leur simulation des pensées du villageois. Entre les deux écrits qui encadrent l’activité orale, voici deux exemples d’un changement de positionnement affectif et axiologique du personnage diariste à l’égard d’Aagun.

ÉLÈVE 10
T1 : J’aimerais vous parler de ce que je ressens. Je suis très en colère car il ne nous a pas aidés du tout. J’aurais tellement envie que vous nous envoyiez un autre garde.
T2 : J’ai changé d’avis. Finalement, je pense qu’il est parti pour tromper les Hounks. Je suis fier de lui. Je vous prie de lui dire !!!

ÉLÈVE 16
T1 : Je pense qu’Aagun est parti car il nous a abandonnés […] Merci de nous donner une autre aide.
T2 : Je pense qu’il est allé tendre un piège aux Hounks mais je ne sais pas lequel c’est. Je suis très curieuse et j’ai envie de savoir ce que fait Aagun. Si vous en savez plus, merci de nous en informer14.

Dans les deux exemples cités, l’échange oral ne mène pas les élèves vers la compréhension explicite de l’attitude d’Aagun, qui ne tend aucun piège aux Hounks ni ne les trompe en quittant le village ; mais, en leur permettant d’abandonner l’idée qu’Aagun est un traitre pour envisager chez lui une pensée stratégique, elle les prépare à la lecture de la fin du récit et à la compréhension de cette stratégie.

Enfin, dans le dernier travail présenté, dont les résultats sont en début d’analyse, le journal de personnage est celui d’Archibald Léopold Ruthmore, scientifique aventurier de l’album Les derniers géants15. Après lecture du récit du massacre par les Wa de tous les hommes de l’expédition, il est demandé aux élèves d’imaginer ce que le héros pourrait écrire dans son journal au lendemain de ce funeste événement dont il est le seul survivant (T1). L’observation des écrits T1 d’une classe (22 élèves présents) montre que sur tous les textes sont très marqués par l’expression des émotions, mais un seul parmi tous traduit le sentiment de culpabilité d’Archibald, La discussion proposée ensuite par l’enseignante concerne le courage, sa définition et ses manifestations. Dans l’écrit suivant (T2), les élèves sont invités à revenir sur le récit du massacre des Wa et à mettre en mots les interrogations d’Archibald sur le courage dont il a fait preuve dans la première partie de son voyage, depuis son départ d’Angleterre16. Ce second écrit doit permettre d’exprimer le sentiment de culpabilité d’Archibald, comme dans l’exemple ci-dessous :

ÉLÈVE E5-22
T1 : Cette nuit-là j’étais terrifié et impuissant, voir tous les compagnons se faire égorger comme des animaux est la pire expérience que j’aie jamais faite. Tant de morts juste pour voir un prétendu pays des géants, j’avais foncé tête baissée dans ce qui peut être un canular.
T2 : Depuis le début de l’expédition, je n’ai servi à rien, mes hommes faisaient tout pour moi, je n’ai pensé qu’à mon voyage et les hommes sont morts à cause de ma bêtise. Je n’ai fait que me plaindre et je me le reprocherai toute ma vie. Si le pays des géants n’existe pas, j’irai étriper ce vendeur de pacotille mais je suis aussi à blâmer.

Dans le second écrit, 12 élèves développent ainsi une interrogation assez expressive au niveau des sentiments qui animent le personnage, évoquant à nouveau l’attaque des Wa pour montrer la lâcheté d’Archibald et exprimer en son nom de la culpabilité. Sa réaction lors de cet événement tragique jouant un rôle important dans la complexité du personnage, la culpabilité ici expérimentée participe au travail d’interprétation mené au fil du récit sur les motivations de cet aventurier. Cependant, deux autres cas de figurent apparaissent. Comme s’ils réinvestissaient des éléments de la discussion collective de manière distanciée, 5 élèves pèsent, de manière un peu artificielle, les moments de courage et les moments de lâcheté durant le périple, mais sans impliquer émotionnellement le personnage. Voici, par exemple, le second écrit de l’élève E5-20 :

ÉLÈVE E5-20
T2 : Cher journal, je me demande si j’ai été courageux depuis le début du voyage ? Je pense que oui car ce voyage était long et éprouvant et j’ai tenu bon malgré ls nombreux problèmes. Cependant, pendant cette attaque, je ne sais si j’aurais dû réagir car j’étais comme paralysé et je pense que si j’avais ne serait-ce qu’aider une personne, je me serais fait tuer dans d’atroces souffrances.

Par ailleurs, certains couples d’écrits, comme celui de l’élève E5-11 donné ci-dessous, sont totalement déséquilibrés, avec un premier écrit assez développé et un second tout juste amorcé.

ÉLÈVE E5-11
T1 : Quand je me suis réveillé, j’ai trouvé tous mes compagnons morts. J’ai ressenti de la tristesse parce que maintenant je me retrouve seul, je suis en même temps envahi par la colère, j’ai juste envie de les étriper les coupeurs de tête.
T2 : Je trouve que je n’étais pas assez courageux parce que…

Cette situation concerne 3 élèves. On peut émettre l’hypothèse que, chez eux, la réflexion demandée lors de l’échange oral ait rompu l’immersion fictionnelle et stoppé la simulation mentale opérée lors de la première lecture, comme si le processus d’empathie fictionnelle mis en jeu lors de la lecture initiale et dont le premier travail d’écriture garde trace, ne s’enclenchait plus pour la seconde activité d’écriture.

Un phénomène un peu similaire apparait à l’observation d’une autre série d’écrits, dans lesquels les élèves racontent, du point de vue d’Archibald, sa rencontre avec les géants (T1), avant de discuter du sentiment d’altérité tel qu’éprouvé par l’explorateur mais aussi par les Géants, puis de reprendre l’écriture d’un second texte avec la consigne initiale (T2). À cette étape du récit, plusieurs des écrits seconds semblent moins expressifs et moins étoffés que les premiers, comme si l’immersion fictionnelle enclenchée par la lecture était atténuée par la réflexion collective sur le concept d’altérité, rendant moins facile la saisie, grâce aux processus empathiques, des états mentaux du personnage. On peut également se demander si certains élèves ne sont pas lassés de répondre par deux fois à des consignes très similaires. Peut-être aurait-il fallu, plutôt que faire réécrire un texte, demander de modifier le texte premier ou de l’enrichir, avec un dispositif permettant de le réviser dans des conditions de réécriture facilitatrices17.

Avec ces différents exemples de travaux conciliant écriture en « je » fictif et échanges oraux entre pairs, il apparaît donc que ces échanges ont eu un impact non négligeable sur les représentations des pensées des personnages, dont les élèves rédigeaient, en « je » fictif, lettres ou pages de journal. Dans le récit de Maryse Condé, le débat axiologique sur le dilemme de Rose-Aimée permet à 20 % des élèves de modifier et de renforcer leur représentation du volontarisme de l’héroïne. Dans la lecture de l’album de Thierry Dedieu, la discussion permet à 50 % des élèves de changer leur regard sur les intentions d’Aagun et, rendant le personnage plus complexe, les oriente dès lors vers un travail interprétatif. Dans ces deux mises en œuvre, conformément aux propos d’Yves Citton, la communauté de lecteur.rice.s aide bien les « subjectivités individuelles » à prendre forme et l’échange avec ses pairs soutient l’élève dans son appropriation subjective du récit. Le va-et-vient dialectique entre implication par l’écriture immersive et distanciation par la discussion semble avoir été fructueux.

Avec l’album de François Place, le débat collectif porte non sur les pensées du personnage d’Archibald mais sur le courage en tant que vertu ou sur l’altérité en tant que concept. Si la discussion sur le courage permet à 60 % des élèves de simuler les interrogations de l’aventurier concernant son attitude pendant le massacre de ses compagnons de route, il semble aussi que les échanges aient parfois nui au processus d’immersion et que certains élèves aient eu du mal à s’impliquer une seconde fois dans les pensées d’Archibald. Les résultats obtenus ne permettent cependant pas de dire si les échecs constatés sont liés à une rupture dans le processus d’immersion, en raison de la discussion, ou bien s’ils sont liés aux conditions d’écriture proposées.

Amorce d’un travail de recherche collaborative

Ces travaux de recherche exploratoires, dont quelques résultats ont été rapidement présentés ici, illustrent l’influence des pairs dans la construction des relations subjectives qui s’établissent entre le lecteur et le personnage, relations confortées ou modifiées par les échanges suscités entre élèves. Ces résultats confirment également la pertinence du nouveau modèle d’empathie lectorale proposé, prenant en compte l’empathie socio-lectorale éprouvé par le lecteur à l’égard de ses co-lecteur.rice.s. Après avoir mesuré, dans la lecture littéraire, l’importance des phénomènes d’empathie fictionnelle, pour la saisie des états mentaux des personnages et la compréhension de la dynamique du récit (Larrivé 2015), il s’agit maintenant d’observer en quoi les relations intersubjectives avec les autres lecteur.rice.s peuvent transformer cet investissement empathique, d’ordre émotionnel et axiologique, à l’égard des personnages.

Nous souhaitons conclure cette présentation par une ouverture vers d’autres travaux à venir, dans le cadre d’un projet de recherche collaborative prolongeant ces réflexions. Ce projet, conduit avec Bénédicte Duvin-Parmentier, dont les travaux en didactique de la littérature portent sur l’expression des émotions (2020), intègre des personnels de l’Éducation Nationale intéressés par le dispositif du journal de personnage. Nous proposons de concilier, de manière plus systématique, le dispositif du journal de personnage avec des interactions verbales entre pairs, sous forme de cercles de lecture ou de débats, pour voir comment s’entrecroisent chez les élèves la capacité d’immersion dans la fiction, dont témoignent les écrits en « je » fictif, et la capacité, observée en classe, à débattre et à discuter avec des co-lecteur.rice.s à propos des œuvres lues et de leurs interprétations. En axant la lecture prioritairement sur les phénomènes d’empathie fictionnelle avec le journal de personnage, mais en combinant le dispositif avec diverses activités orales partagées portant soit sur la réception subjective de l’œuvre, soit sur des points d’analyse distanciée, nous tenterons d’observer comment se combinent ou s’opposent, selon les activités orales proposées, les différentes activités empathiques en jeu dans la lecture scolaire, empathie fictionnelle, empathie textuelle et empathie socio-lectorale.  

Annexes

Brefs résumés18 des trois œuvres lues dans les classes, supports des échanges oraux et des activités d’écriture dans le journal de personnage.

Annexe 1

Résumé de l’album de Thierry Dedieu, Aagun
Une tribu est régulièrement attaquée et pillée par ses voisins, les Hounks. À leur demande, le seigneur Batoor envoie son lieutenant Aagun pour prêter main forte aux villageois. Cependant, en obligeant les habitants à chasser avec lui et en donnant régulièrement une partie de son butin aux Hounks, Aagun n’agit pas du tout comme l’imaginaient les villageois. Ceux-ci se plaignent donc à leur seigneur, mais il les renvoie avec un sourire et le rude entrainement reprend. Après le départ inattendu d’Aagun, la colère est à son comble. Aurait-il trahi les villageois ?

Annexe 2

Résumé du roman de Maryse Condé, Rêves amers
L’histoire se situe en Haïti, dans les années 1980. À l’âge de 13 ans, parce que ses parents sont trop pauvres pour la garder au village, Rose-Aimée doit partir travailler comme domestique dans la ville de Port-au-Prince. Après un voyage qui lui fait rencontrer Lisa, une autre jeune fille de sa condition, Rose-Aimée est embauchée par Mme Zéphyr. C’est une riche couturière qui la maltraite. Un jour, après une livraison, Rose-Marie perd l’argent confié par une cliente (Mme Dorismond). Terrifiée à l’idée de revenir chez sa patronne, elle se réfugie avec les sans-abris de la ville, et retrouve Lisa, elle aussi en fuite, Forte de l’argent qu’elle a volé à sa patronne, Lisa propose à Rose-Aimée de partir avec elle en bateau vers les États-Unis. Après d’autres péripéties montrant les difficultés rencontrées pour échapper à l’injustice sociale, les deux jeunes filles embarquent pour la Floride. Mais l’aventure n’est pas terminée.

Annexe 3

Résumé de l’album de François Place, Les derniers géants
Sur un marché londonien, Archibald Leopold Ruthmore, scientifique anglais du XIXème siècle, achète une dent gigantesque sur laquelle est gravée une carte géographique. Attiré par la curiosité, il organise immédiatement une expédition qui le mène, par voie maritime puis pédestre, jusqu’aux confins de l’Asie. Tout son équipage trouve la mort lors d’une attaque surprise par la tribu des Wa mais, poursuivant son périple seul à travers les forêts et les paysages montagneux, Archibald atteint le lieu convoité. Après avoir passé près d’une année avec les géants, qui l’acceptent comme l’un des leurs, il décide un jour de quitter ses amis et de rentrer chez lui. Revenu en Angleterre, il se lance alors dans la rédaction d’un ouvrage très documenté sur le mode de vie des géants. Quelques années plus tard, en raison du succès de son encyclopédie, il commence une longue tournée de conférences dans le monde. Sa notoriété est telle qu’il obtient le financement pour une nouvelle expédition. Cependant, au pays des géants, une surprise l’attend…

Références bibliographiques

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Walton, Kendall L. 1990. Mimesis as make-believe: on the foundations of the representational arts. 1. paperback ed. Cambridge, Mass.: Harvard University Press.

  1. Selon cette théorie, la lecture d’un professeur préparant son cours sur un texte littéraire et celle du même lecteur se distrayant avec un roman policier ne mettraient pas en jeu, dans la même proportion, les instances du lectant et du lisant.↩︎

  2. Émotions que Blanc appelle « fictives », là où nous avons préféré l’adjectif « fictionnelles ».↩︎

  3. Émotions que Blanc nomme « artefacts » là où nous avons choisi l’adjectif « textuelles ».↩︎

  4. On nomme ainsi l’association de la philosophie et de la psychologie cognitives avec les neurosciences.↩︎

  5. Les démarches didactiques visant l’autonomie des élèves tendent à réduire chez eux cette envie de conformité à ce qu’ils croient être les attentes de leur professeur.↩︎

  6. En ce qui concerne le lecteur adulte, on peut considérer que ses co-lecteurs sont tout à la fois les proches avec lesquels il échange sur les livres lus ou à lire, les libraires et bibliothécaires qui lui donnent des conseils de lecture et les critiques littéraires auxquels les différents médias donnent la parole.↩︎

  7. On nomme ainsi, à l’INSPE de Toulouse, les travaux de recherche mené par les professeurs stagiaires ayant déjà soutenu un mémoire de Master, et dont la formation prévoit qu’ils réitèrent cette expérience d’écrit scientifique, soit dans la continuité de leur mémoire, soit à partir d’une problématique professionnelle nouvelle.↩︎

  8. Les professeures d’école concernées sont respectivement Marie-Diane Clanet, Alisée Fabre et Pauline Calmettes, dont nous avons encadré les mémoires de Master dans le domaine de la didactique de la littérature en 2019-2020, puis les écrits réflexifs en 2020-2021, et que nous remercions chaleureusement de nous avoir autorisée à citer leurs travaux et de nous avoir permis d’utiliser leurs données.↩︎

  9. Il s’agit des classes de Delphine Scaggiari, professeure de français dans un collège du centre-ville de Toulouse.↩︎

  10. Voir en annexe 2, le bref résumé de ce roman.↩︎

  11. Écrits de l’élève 19 extraits du travail d’Alisée Fabre intitulé Journal de personnage, réactions émotionnelles et réactions axiologiques.↩︎

  12. Écrits des élèves 11 et 16 extraits du travail de Pauline Calmettes intitulé Journal de personnage et discussion axiologique.↩︎

  13. Voir en annexe 1, le bref résumé de l’histoire racontée dans l’album.↩︎

  14. Écrits des élèves 10 et 16 extraits du travail de Marie-Diane Clanet intitulé Journal de personnage et interactions entre pairs.↩︎

  15. Voir en annexe 3, le bref résumé de l’histoire racontée dans l’album.↩︎

  16. Le choix de faire varier légèrement la consigne du second écrit demandé est justifié par la crainte de l’enseignante d’un investissement moindre des élèves en cas de consigne strictement similaire. Nous verrons que son intuition était peut-être bonne.↩︎

  17. On peut imaginer que le texte soit mis sous format numérique ou reproduit sur un brouillon de grande taille, ce qui, dans les deux cas, offre des possibilités plus aisées de suppressions, ajouts ou déplacements.↩︎

  18. Pour ne pas interférer dans le processus d’empathie fictionnelle lors de la réception première des œuvres, nous laissons aux lecteurs qui ne connaissent pas encore ces trois récits le plaisir d’en découvrir par eux-mêmes la fin.↩︎